et directives de vote… des directeurs Motorola.
(ou comment ces derniers participent à l’effort de réduction des coûts)
Si vous cotisez à MotShare, vous êtes actionnaires et vous avez dû recevoir un courrier (en anglais) vous invitant à voter :
- Pour le renouvellement des 11 directeurs de Motorola.
- Pour deux propositions (« shareholder proposal 2 and 3 ») qui ont été faites par les actionnaires eux-mêmes.
Constatations sur la manière très « démocratique » de procéder :
- Le bulletin permettant un vote par courrier est incompréhensible sans avoir lu le document « proxy statement » expliquant les propositions des actionnaires.
- Le bulletin insiste plusieurs fois, par des phrases en gras et des mots soulignés, sur les recommandations de vote faites par les directeurs de Motorola.
- Le bulletin n’explique pas que s’abstenir de voter une proposition (case « Abstain ») a le même effet que voter contre (case « Against »). L’utilité de cette case est donc plus que douteuse !
- Le bulletin n’explique pas les effets de ne pas voter du tout.
- L’absence d’une ou plusieurs réponses, sur un bulletin renvoyé, a le même effet que répondre en suivant les recommandations des directeurs de Motorola.
- Le bulletin n’explique pas clairement que les directeurs de Motorola sont présentés (avec photo et CV) d’une part, et que les propositions des actionnaires, et l’avis des directeurs sur celles-ci, sont largement détaillées d’autre part, le tout dans un seul et même document : le « proxy statement » (www.motorola.com/investor puis lien « 2004 proxy statement »).
La lecture attentive du document « proxy statement » apporte de précieuses indications concernant les propositions des actionnaires. Ces propositions sont pleines de bon sens, surtout pour une multinationale connaissant des difficultés (pour rappel, Motorola est passée de plus de 150.000 employés en 2000 à moins de 90.000 début 2004, et la séparation crée deux multinationales de moins de 45.000 chacune). Ces propositions consistent :
- à limiter les salaires et avantages (« compensations ») des directeurs de Motorola à une somme d’un million de dollars. « shareholder proposal 2: commonsense executive compensation ».
- A remplacer l’utilisation abusive des « stock options » par une distribution d’actions dont le nombre dépend de la performance des directeurs (par rapport à leurs objectifs) et est restreint pour une période de temps donnée. « shareholder proposal 3 : performance and timed-based restricted shares ».
Il faut savoir que M. Edwars J. Zander, directeur général (« CEO or Chief Executive Officer ») de Motorola, recevra environ 20 millions de dollars de « compensations » (salaires, bonus, « stock » et « stock options ») en 2004, comme l’explique l’article de « Hoover’s News » suivant :
MOTOROLA CEO TO GET MORE THAN $20 MILLION IN TOTAL COMPENSATION FOR 2004 Motorola’s new CEO, Edward Zander, will receive around $20 million in salary, bonuses, stock, and stock options for 2004.
Zander’s paycheck breaks down roughly as follows: He will get an annual salary of $1.5 million, a $2 million cash bonus, an $8 million signing bonus mostly comprising stock and stock options, plus another award of stock options valued at $6.25 million. He is still being paid less than his predecessor, Christopher Galvin, during the years that Motorola was riding high.
Mais le plus intéressant et le plus révélateur sur la mentalité du bureau des directeurs de Motorola sont les arguments avancés pour justifier de voter contre ces deux propositions des actionnaires. · Pour la proposition #2 (limitation des « compensations » des directeurs), le bureau des directeurs considère que cela limitera sévèrement la capacité de la société à attirer et retenir les directeurs qui sont critiques pour le succès de Motorola.
Mais sept directeurs sur onze ont plus de neuf ans d’ancienneté et n’ont pas su, dans leur position « critique », assurer le succès de Motorola ces trois dernières années. Trois autres, directeurs depuis 2002, n’ont pas plus réussi, en deux ans, a redresser significativement la barre. On peut douter que M. Zander, entouré de ces 10 directeurs, obtiennent de meilleurs résultats avec leur politique :
- de délocalisation qui concerne de plus en plus le coeur d’activités de Motorola,
- de fractionnement pour éliminer les secteurs les moins rentables,
- de rachats hasardeux et destructifs d’entreprises extérieures, …
· Pour la proposition #3 (remplacement des « stock options » par une distribution d’actions dépendante des performances des directeurs et dont le nombre est limité dans le temps), le bureau des directeurs de Motorola ne commente pas cette proposition mais la rejette en expliquant que les différents types de récompenses équitables destinées aux directeurs, incluant les « stock options » et les différents « stocks » (dont un seul basé sur la performance) sont appropriés par leur variété et par le fait que le programme de « compensations » est conçu pour promouvoir le long terme.
En résumé, les directeurs refusent que leurs propres « compensations » en actions soient dépendantes de leur performance (mesurée par rapport à leurs objectifs) comme c’est la règle, depuis plusieurs années, pour l’évolution du salaire des cadres de Motorola.
Ils refusent donc d’appliquer à eux-mêmes le système qu’ils ont mis en place. Ils veulent pouvoir continuer à toucher les mêmes « compensations » car la majorité de celles-ci ne dépend pas des performances par rapport à des objectifs rarement atteints !
Les deux tiers restant du document détaillent les « compensations » attribuées aux directeurs en 2003.
Pour conclure, les directeurs de Motorola refusent toute réforme liée à leurs avantages monstrueusement élevés (plusieurs millions de dollars chacun, chaque année) par rapport aux résultats et aux actions entreprises pour redresser la multinationale.
Ces directeurs invitent fortement les actionnaires à continuer de cautionner ces « compensations » alors que des pressions inacceptables, tant financières (réduction des coûts, augmentations ridicules, primes dérisoires) que morales (mesure des objectifs, classement forcé des employés, licenciements massifs, fermeture de sites…) pèsent, depuis trois ans, sur des employés qui apportent, malgré tout, leur productivité et leurs compétences.
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